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Anges et démons font la bombe
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- Le 13/01/2017
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Below - Acrylique sur papier spécial - 21x30 - 2017
Créer est pour moi l'issue d'un intense combat. Cette prise de conscience me permet de comprendre pourquoi j'étais jusqu'ici peu à l'aise avec la notion de plaisir lorsque je peins.
Dans l'imaginaire du public, la pratique des arts plastiques est souvent un loisir, donc quelque chose que l'on pratique avec plaisir puisqu'un loisir est choisi. C'est parfois l'exercice d'un talent, en général reconnu par le spectateur par la beauté qu'il voit dans l'œuvre ou l'émotion qu'elle provoque en lui. Le talent s'exerce avec fluidité, sans effort démesuré, puisqu'il représente par définition un don remarquable ou une aptitude particulière.
Dans mon processus de création, je ne ressens ni plaisir ni souffrance et ce n'est jamais un problème. Mes créations sont une libération d'énergie, telle une bombe qui explose à un moment impossible à prévoir. Il peut se passer plusieurs mois sans que je touche un pinceau ou un couteau. Dans ce contexte, tous les jours, toutes les heures, à chaque minute parfois, je sens une voix qui me dit : "ça commence à faire longtemps que tu n'as pas peint". Aussitôt une autre voix intérieure répond : "si tu ne peins pas, c'est que ce n'est pas le moment, tu le sais bien. Quand ce sera le moment, tu le sauras, tu le sentiras. Alors patiente !".
Ainsi, je suis le soldat en alerte, qui guette ses sensations qui le préviennent que la bombe va bientôt exploser. Je me sens aussi comme un médiateur, celui qui permet à l'ange et au démon de trouver un terrain d'entente pour faire sortir le soldat-créateur de son inaction, pour l'envoyer au combat libérateur.
C'est alors que d'autres créatures prennent le relai et le soldat, armé de son couteau à peindre, doit arbitrer les choix gestuels et colorés : "pas trop de couleur", dit l'une ; "suis ton instinct", dit l'autre ; "fais un geste ample", dit une troisième; "coupe les liens avec le cerveau", sussure une quatrième...
Laquelle est ange ? Laquelle est démon ? Je finis par m'y perdre. Finalement le talent du médiateur-soldat est de les faire coexister. Le bien, le mal, les anges, les démons, l'imagerie populaire est riche dans ce domaine. Si l'homme social choisit son camp, selon les repères culturels dont il dispose, l'artiste créateur, lui, ne peut prendre parti. Car le démon du moment sera peut-être l'ange d'un autre et vice-versa. Ils sont tous les deux très importants car, sans eux, pas de tension, pas d'énergie, pas d'explosion, pas de libération.
"Below" n'a pas échappé à ce processus créatif. L'énergie s'était accumulée pendant 3 mois avant sa libération.